Le coronavirus ne connaît ni frontières, ni classes sociales, ni religion, entend-on dire parfois depuis le début de l’épidémie de Covid-19 à travers le monde. Pourtant, la maladie réveille parfois la discrimination et le racisme contre les personnes diagnostiquées positives au virus. C’est ce que dénoncent au Chili des migrants haïtiens et des associations qui les accompagnent alors qu’un foyer de contagion est apparu.

Six chaînes de télévision installées devant chez eux, en direct. Voici ce qu’ont vécu les habitants d’une « cité », comme l’appellent les Chiliens, une petite impasse où ont été construites des chambres individuelles précaires louées à prix d’or par un propriétaire peu scrupuleux.

Trente trois cas de coronavirus y ont été confirmés récemment, mais surtout, les locataires sont presque tous d’origine haïtienne. « Les résidents vivaient depuis plusieurs semaines un harcèlement de la part de voisins, des médias, nous explique Michelle Viquez, du service jésuite d’aide aux migrants. Sans compter le racisme structurel auquel doivent faire face bien souvent les afro-descendants. »

Au moins 50 personnes ont été transférées vers des hôtels, pour une quarantaine préventive ou bien le temps de récupérer de la maladie. Mais par peur de se retrouver sans revenus, par incompréhension aussi, certains résidents ont refusé de se rendre dans ces logements.

Le service jésuite d’aide aux migrants regrette qu’il n’y ait pas à ce jour d’information en créole de la part du gouvernement concernant l’épidémie de coronavirus et mais aussi concernant les aides sociales mises en place en cette période économique difficile.

Coronavirus en Haïti: les experts craignent plus de 20000 morts

L’épidémie de Covid-19 n’en est encore qu’à ses prémices en Haïti : selon le dernier bilan officiel, publié jeudi, le pays de la Caraïbe n’a recensé que 72 cas dont 5 malades qui sont décédés des complications liées au virus. Mais les experts s’inquiètent du potentiel lourd bilan humain : selon leurs projections, plus de 20 000 Haïtiens pourraient mourir du coronavirus.

« Lavez vous les mains et portez un masque. » Les autorités répètent sans cesse ces consignes pour prévenir la propagation du virus. La cellule scientifique mise en place par le gouvernement le mois dernier a tenu sa première conférence de presse vendredi et l’épidémiologiste Patrick Dely a présenté les inquiétantes projections pour les prochaines semaines.

« Dans un cas de figure idéal, dans le meilleur scénario possible, nous prévoyons environ 2 000 décès mais, suivant l’évolution de la situation, nous pouvons prendre ces prévisions et les multiplier par cinq, par dix. Et dans un cadre catastrophique, nous pouvons aller au-delà de 20 000 décès », estime-t-il.

Les mesures barrières que sont le confinement et la distanciation sociale sont un luxe que les habitants les plus pauvres d’Haïti ne peuvent malheureusement se permettre.

En manifestant cette semaine contre les mesures de restrictions de leurs activités, les commerçantes des marchés informels de Pétionville ont froidement résumé la situation. Leur slogan : « Mourir de faim ou mourir du coronavirus, on a fait notre choix ».