En lançant une campagne de lutte contre le racisme avec une peinture représentant trois singes, la Ligue italienne de football a provoqué un tollé. Après 24 heures de critiques, l’instance a présenté ses excuses mardi 17 décembre pour cette initiative « inappropriée ».
Cela partait d’un bon sentiment. Ou plutôt d’une nécessité incontournable tant le fléau du racisme sévit toujours dans le football en Italie. Lundi 16 décembre, la Ligue de football italienne a lancé une campagne de communication intitulée « Non au racisme ». La forme, elle, a provoqué un scandale.
Car pour accompagner sa campagne, la Ligue a fait appel au travail de l’artiste Simone Fugazzotto. Résultat : pour lutter contre le racisme dans le football qui vise particulièrement les joueurs de couleur, la Ligue a publié trois affiches montrant des singes aux visages bariolés de différentes couleurs.
La Roma et le Milan montent au créneau
Dans un pays où les footballeurs noirs font justement l’objet de cris de singes et de jets de bananes, la campagne se veut déroutante. Il n’a pas fallu beaucoup de temps pour que, sur les réseaux sociaux, les critiques s’accumulent. L’AS Rome, club qui a dû présenter des excuses en octobre après que certains de ses supporters eurent agressé verbalement le joueur anglais d’origine bissau-guinéenne Ronaldo Vieira, a peu goûté à ces affiches. « Nous comprenons que la Ligue veuille s’attaquer au racisme, mais nous ne croyons pas que ce soit le bon moyen de le faire », a réagi la Roma dans un communiqué.
L’AC Milan n’a pas apprécié non plus. Les Rossoneri enchaînent les communiqués courroucés depuis quelques semaines d’ailleurs. Début décembre, le club lombard avait fustigé le journal Corriere dello Sport, qui avait cru bon de mettre en Une deux joueurs de couleurs, Chris Smalling (AS Rome) et Romelu Lukaku (Inter Milan), tous deux déjà victimes de racisme, avec le titre « Black Friday ».
Ce mardi 17 décembre, les Milanais ont repris de volée la campagne de la Ligue de football italienne : « L’art peut être puissant, mais nous sommes fortement en désaccord avec l’utilisation de singes en tant qu’images de combat contre le racisme et sommes surpris par l’absence totale de consultation. »
« Une campagne qui ressemble à une mauvaise blague »
La Ligue italienne a justifié son choix d’opter pour ce triptyque singulier avec ces singes. Son objectif était de « défendre les valeurs d’intégration, de multiculturalisme et de fraternité ». D’ailleurs, ces affiches ne sont qu’une partie de la campagne « Non au racisme ». Elles s’accompagnent aussi d’une charte que doivent signer les 20 clubs de Série A , le championnat d’élite italien.
L’artiste Simone Fugazzotto a déclaré, de son côté, que « nous sommes tous des singes » et qu’avec son œuvre, il a voulu « raconter que nous sommes des créatures complexes et passionnantes, que nous pouvons être tristes ou heureux, catholiques, musulmans ou bouddhistes, mais que au fond, ce qui détermine ce que nous sommes, ce sont nos actions pas la couleur de notre peau ».
Aucun de ces arguments n’a pu toutefois éteindre la polémique. L’association FARE (Football Against Racism in Europe) a résumé l’impression générale : « Une fois de plus, le football italien laisse le monde sans voix. Dans un pays dans lequel les autorités restent incapables, semaine après semaine, de s’occuper du racisme, la Serie A a lancé une campagne qui ressemble à une mauvaise blague. »
La Serie A s’excuse mais reste déterminée
Luigi De Siervo, l’administrateur délégué de la Serie A qui avait présenté la campagne lundi, a présenté mardi 17 décembre dans un communiqué « ses excuses à toutes les personnes qui se sont senties offensées ». « J’ai réalisé que c’était inapproprié », a-t-il reconnu. Et s’il a concédé que l’initiative était « discutable », en revanche, « ce qui n’est pas à remettre en question, c’est la condamnation forte et constante de la Serie A contre toutes les formes de discrimination et de racisme, phénomènes que [nousnous]engageons à éradiquer de [notre] championnat ».
En plus de la charte contre le racisme, chaque club de Serie A a désigné un joueur chargé de porter et symboliser ce combat en tant que « représentant anti-racisme ». Parmi eux, on retrouve le Français Blaise Matuidi (Juventus), l’Argentin Joaquin Correa (Lazio Rome), le Ghanéen Kevin-Prince Boateng (Fiorentina), le Sénégalais Kalidou Koulibaly (Naples), l’Ivoirien Gervinho (Parme) ou encore l’Italien Davide Calabria (AC Milan).
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