Publié le 2017-11-13 | Le Nouvelliste

Pour Guichard Doré, l’un des plus influents conseillers de Jovenel Moïse, le rapport est sans valeur et vise plutôt à nuire qu’à aider à faire la lumière sur la gestion des fonds PetroCaribe. « Le Sénat peut mener des enquêtes, mais pas sur des anciens membres d’un gouvernement », a déclaré le conseiller spécial du président de la République. Selon Guichard Doré, il revient à la Cour des comptes et du contentieux administratif d’enquêter à ce niveau pour le Parlement.

« Les sénateurs ont confondu leur champ de compétence », a-t-il lancé. Cependant, il reconnait aux parlementaires le droit d’exercer des « contrôles politiques » sur des ministres et Premiers ministres en fonction en les convoquant ou en les interpellant.

« J’ai l’impression que les parlementaires ne veulent pas faire la lumière sur les fonds PetroCaribe. Ce qu’ils ont fait, ils le font pour la communication politique et l’animation de l’opinion publique. Leur travail n’a donc aucune valeur si ce n’est que pour nuire », a-t-il dénoncé. En revanche, Guichard Doré se dit pour la lumière sur l’utilisation des fonds PetroCaribe.

Les membres de la commission Anticorruption ont annoncé qu’ils allaient envoyer leur rapport à la justice pour les poursuites judiciaires. M. Doré a estimé que le Parlement n’a pas à passer des ordres au pouvoir judiciaire, soulignant que le législatif n’est pas plus pouvoir que le pouvoir judiciaire.

Yves Germain Joseph et Wilson Laleau, respectivement secrétaire général du Palais national et chef de cabinet du président de la République ainsi que deux anciens ministres de l’administration Martelly sont épinglés dans le rapport. Pour Guichard Doré, outre le fait que le rapport de la commission sénatoriale n’a aucun effet légal sur eux, le rapport n’a non plus aucune conséquence morale sur ces deux hauts cadres du Palais national.

Réagissant en son nom personnel, Yanick Mézile, ancienne ministre à la Condition féminine sous l’administration Martelly, présidente du Parti haïtien tèt kale (PHTK), le parti au pouvoir, a fait savoir au Nouvelliste que l’enquête sur l’utilisation des fonds PetroCaribe a été réalisée par des opposants politiques et est donc par conséquent dénuée de toute crédibilité. Elle aurait pris plus au sérieux l’enquête si elle avait été réalisée par une entité « indépendante ». Madame Mézile a annoncé que le PHTK se réunirait ce mardi pour se prononcer officiellement sur le document.

Liné Balthazar, membre du directoire du PHTK, a abondé dans le même sens. Pour lui, le rapport de la commission sur l’utilisation des fonds PetroCaribe ressemble plus à un règlement de comptes politiques qu’à autre chose. Selon le responsable des affaires électorales du PHTK, le document attire plus l’attention par ses omissions que par son contenu réel. M. Balthazar dit craindre que la commission ait raté l’occasion de faire une enquête objective.

Si les porte-paroles de Jovenel Moïse n’ont pas voulu réagir pour le moment sur le rapport de la commission sénatoriale, le chef de l’État, samedi au Cap-Haïtien, devant une foule, a une fois de plus réaffirmé sa volonté de lutter contre la corruption sous toutes ses formes. « La corruption est un cancer pour le pays. C’est un crime contre le développement. Je prends l’engagement d’utiliser l’argent du pays non en faveur d’un groupe, mais en faveur de toute la population », a lancé le président de la République.

Dans son rapport, la Commission sénatoriale spéciale d’enquête (CSSE) présidée par le sénateur Évalière Beauplan, chargée d’approfondir le rapport de la commission Éthique et Anticorruption dirigée par le sénateur Youri Latortue, recommande de mettre l’action publique en mouvement contre plusieurs haut fonctionnaires de l’administration Tèt kale première version comme Laurent Salvador Lamothe, ex Premier ministre et ministre de la Planification et de la Coopération externe, pour forfaiture, concussion, détournement de deniers publics et soustraction de deniers publics; Wilson Laleau, ex-ministre des Finances, pour détournement ou dissipation de deniers publics ; Max Rudolph Saint-Albin, actuel ministre de l’Intérieur, pour détournement ou dissipation de deniers publics ; Josefa Gauthier, pour forfaiture, concussion, détournement de deniers publics ; Marie-Carmelle Jean-Marie, ex-ministre des Finances pour détournement ou dissipation de deniers publics ; Jacques Rousseau, pour forfaiture, concussion, détournement ou dissipation de deniers publics ; Florence Guillaume Duperval, ex-ministre de la Santé publique, pour forfaiture, concussion, détournement de deniers publics, soustraction de deniers publics ; Stéphanie Balmir Villedroouin, ex-ministre du Tourisme, pour forfaiture, concussion, détournement de fonds publics ; Yves Germain Joseph, actuel secrétaire général du Palais national et ex-ministre de la Planification, pour forfaiture, concussion, détournement ou dissipation de deniers publics; Hebert Docteur, ex-ministre de l’Agriculture pour usurpation, entre autres…

Publié le 2017-11-13 | Le Nouvelliste