Le nouveau règlement de l’IAAF oblige les athlètes hyperandrogènes à faire baisser leur taux de testostérone sous le seuil de 5 nmol/L de sang. Une consigne jugée contraire aux codes d’éthique par le corps médical.

L’Association médicale mondiale (AMM) a de nouveau mis en garde le monde médical sur les conséquences éthiques du nouveau règlement de la fédération internationale d’athlétisme (IAAF) qui oblige les athlètes hyperandrogènes à faire baisser leur taux de testostérone, recommandant dimanche aux médecins de ne pas l’appliquer.

“Nous pensons qu’il est extrêmement grave que les réglementations sportives internationales demandent aux médecins de prescrire des médicaments – des médicaments à action hormonale – aux sportifs afin de réduire les conditions normales dans leur corps”, a déclaré dimanche Frank Ulrich Montgomery, le vice-président du conseil de l’AMM, lors d’une interview à la télévision nationale australienne.

Un taux de testostérone jugé trop haut

Frank Ulrich Montgomery a estimé que pour les femmes atteintes de DSD (différence du développement sexuel), comme l’athlète sud-africaine Caster Semenya, “il est tout à fait normal d’être hyperandrogène et il n’y a rien de pathologique dans la situation de cette athlète”. En tant que médecin, “rien ne m’oblige à administrer ces médicaments, et nous exhortons instamment nos collègues à s’abstenir de donner des médicaments hormonaux aux athlètes simplement à cause des exigences réglementaires,” a ajouté le dirigeant de l’AMM. 

Le TAS a débouté mercredi Semenya de son recours contre le nouveau règlement de l’IAAF obligeant notamment les athlètes hyperandrogènes, comme elle, à faire baisser leur taux de testostérone sous le seuil de 5 nmol/L de sang. L’IAAF a indiqué que les athlètes concernées avaient jusqu’au 8 mai pour faire baisser ce taux à l’aide d’un traitement si elles veulent participer aux compétitions internationales du 400 m au mile (1609 m), notamment aux Championnats du monde d’athlétisme à Doha (27 septembre-6 octobre). Semenya, qui envisage de faire appel de cette décision, a d’ores et déjà déclaré qu’elle ne prendrait pas de médicaments pour réduire son taux de testostérone.

Une infraction aux codes d’éthique

“Si les médecins administrent ces médicaments, ils enfreignent les codes d’éthique”, a par ailleurs souligné le professeur Montgomery, rappelant que “le code éthique de base de toute pratique médicale est de ne jamais nuire”. Or, “il est nuisible pour un corps parfaitement normal avec juste un niveau élevé de testostérone de recevoir des médicaments à utiliser dans le but d’être admissible au sport féminin en vertu de certaines réglementations”, a-t-il souligné.

En tant que signataire du code médical du mouvement olympique du CIO, l’IAAF est en théorie tenue de se conformer au code éthique de l’AMM. Dès jeudi, l’AMM avait réclamé le retrait pur et simple du nouveau règlement IAAF, émettant par la voix de son président, le Dr Leonid Eidelman, de “sérieuses réserves” quant à la “validité éthique” de ce texte “fondé sur la preuve ténue d’une seule étude, actuellement largement contestée par la communauté scientifique”.

Le professeur Montgomery a réfuté dimanche l’argument de l’IAAF selon lequel Semenya et les athlètes hyperandrogènes bénéficient d’un avantage injuste par rapport à leurs concurrentes. “La prochaine étape sera de demander aux basketteurs qui mesurent plus de 2,25 mètres de subir des opérations chirurgicales pour réduire leur taille, car le fait d’être si grand les avantage par rapport à des joueurs plus petits”, a-t-il argué. “Jusqu’où ira-t-on ?” s’est-il interrogé.