Vendredi, le président américain doit annoncer au Congrès qui est responsable du meurtre de l’opposant saoudien Jamal Khashoggi, tué en octobre dernier à Istanbul. 

Donald Trump doit dire vendredi au plus tard au Congrès américain qui il juge responsable de l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, une échéance qui pourrait relancer le débat sur le rôle du prince héritier d’Arabie saoudite dans cette affaire. Mais le département d’Etat américain a semblé jeudi minimiser cette date-butoir pourtant prévue par la loi, assurant seulement vouloir “continuer à travailler avec le Congrès” dont il partage “l’indignation”.

Que l’Arabie Saoudite “poursuive ses investigations”. Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo s’est lui entretenu jeudi à Washington avec le ministre d’Etat saoudien aux Affaires étrangères Adel al-Jubeir. Les deux hommes “sont convenus de l’importance de voir l’Arabie saoudite poursuivre ses investigations” de “manière transparente” pour que “toutes les personnes impliquées rendent des comptes”, selon le département d’Etat.

Le 2 octobre, Jamal Khashoggi, critique du régime saoudien qui collaborait notamment avec le Washington Post et résidait aux Etats-Unis, a été tué et démembrédans le consulat de son pays à Istanbul par des agents saoudiens venus depuis Ryad.

Un délai de 120 jours qui expire vendredi. Le 10 octobre, un groupe de sénateurs américains, républicains et démocrates, ont activé une loi qui oblige Donald Trump à dire au Congrès, dans un délai de 120 jours qui prend fin vendredi, quels ressortissants étrangers il considère responsable de cet assassinat, et à prendre, le cas échéant, des sanctions à leur encontre. Interrogé sur cette obligation, le porte-parole de la diplomatie américaine Robert Palladino a répondu jeudi que le gouvernement américain avait déjà sanctionné mi-novembre 17 responsables saoudiens. “Je n’ai rien à ajouter aujourd’hui”, a-t-il dit.

– “Les tensions entre la France et l’Italie peuvent durer jusqu’aux européennes”

Pour le politologue italien Alberto Toscano, la crise diplomatique qui secoue Paris et Rome est née de la volonté du mouvement 5 étoiles de faire alliance avec les “gilets jaunes” en vue des européennes.

C’est un fait rarissime dans les relations franco-italiennes : Paris a rappelé jeudi l’ambassadeur de France en Italie pour consultations. “La France a fait, depuis plusieurs mois, l’objet d’accusations répétées, d’attaques sans fondement, de déclarations outrancières” de la part de Rome, a dénoncé la porte-parole du Quai d’Orsay. Si des tensions sont palpables entre les deux pays amis depuis l’arrivée au pouvoir en Italie d’une coalition populiste, la récente rencontre en France entre le vice-Premier ministre italien Luigi Di Maio et des “gilets jaunes” a envenimé la situation. Et, selon le journaliste et politologue italien Alberto Toscana, interviewé par Europe 1, ces tensions devraient durer jusqu’aux élections européennes, alors que le mouvement 5 étoiles cherche à s’allier avec des “gilets jaunes”.  

Quel est l’impact diplomatique du rappel de l’ambassadeur de France ?

“Ce rappel est symbolique mais ce n’est pas anodin pour autant. Il est le symbole d’une dégradation sérieuse de la relation franco-italienne. Il y a plusieurs dossiers brûlants entre les deux pays, comme la construction d’une ligne ferroviaire Lyon-Turin, le rachat des Chantiers de l’Atlantique (ex-STX France, ndlr) par Fincantieri,… Et là, le vice-Premier ministre italien vient mettre de l’huile sur le feu en cherchant une entente avec les ‘gilets jaunes’.

L’ambassadeur français va ainsi revenir quelques jours. L’ambassadrice italienne à Paris pourrait être rappelée en retour mais ça m’étonnerait, car c’est plutôt une réponse qu’on donne à un pays rival. La France et l’Italie veulent montrer les muscles, mais elles savent qu’il y a certaines limites à ne pas franchir. Les Italiens ont été certainement surpris par ce rappel… Et l’ambassadrice italienne va plutôt tenter de calmer le jeu. C’est un dérapage sous contrôle finalement. On n’a pas encore tourné la page de l’amitié.”

Quel est le message envoyé à Rome ?

“Le message ne fait aucun doute : la France ne tolère pas qu’un gouvernement étranger prenne part à la campagne électorale française. Surtout avec le mouvement des ‘gilets jaunes’, qui est responsable de manifestations et de violences… La situation aurait peut-être été différente si la délégation du mouvement 5 étoiles venue en France rencontrer des ‘gilets jaunes’ ne comprenait pas un membre du gouvernement italien, qui est presque le n°2 de l’exécutif. Là, ça a été considéré comme ‘un peu trop’ par Paris.”

Y a-t-il eu des précédents entre les deux pays ?

“On a déjà vu des moments de crise entre Rome et Paris. C’est notamment arrivé en 1995 quand Jacques Chirac a annulé un sommet bilatéral avec l’Italie – qui a lieu tous les ans -, en raison de protestations italiennes aux essais nucléaires français en Polynésie. Les tensions ne sont donc pas nouvelles, mais elles étaient moins graves, ou c’était surtout pour des raisons économiques.

Là, ce qui est nouveau, c’est le degré de tensions. Rappeler son ambassadeur, c’est une mesure rare entre pays amis et alliés, encore plus au sein de l’Union européenne. Je vis en France depuis 33 ans maintenant, et je n’ai jamais vu ça entre les deux pays. Je pense que c’est une première dans l’histoire de la Vème République.”

Quelles sont les raisons politiques de cette discorde ?

“Le mouvement 5 étoiles (au pouvoir avec La Ligue en Italie, ndlr) parie sur les ‘gilets jaunes’ et les encourage. Il cherche à trouver des alliés en vue des élections européennes… Aujourd’hui, les 5 étoiles sont dans le même groupe que Ukip (parti britannique qui milite pour le Brexit, ndlr) au Parlement européen, mais celui-ci va finir par quitter le Parlement européen du fait du retrait du Royaume-Uni de l’UE.

Alors le mouvement 5 étoiles dialogue avec les ‘gilets jaunes’ pour les pousser à présenter une liste aux européennes, et monter un groupe parlementaire avec eux à Strasbourg. Donc, selon moi, les tensions entre Paris et Rome peuvent durer jusqu’aux élections européennes, parce que le mouvement 5 étoile risque de se trouver en difficulté s’il fait marche arrière. Il a des raisons électorales, des raisons de politiques intérieures de ne pas céder avant le 26 mai.”